Bienvenue dans le deuxième épisode de mon Carnet MNT. Si c’est la première fois que vous m’écoutez, je m’appelle Christopher Agbega et je viens du Ghana, en Afrique de l’Ouest. Dans le premier épisode, j’ai raconté ma vie avec la neuropathie motrice sensorielle au cours des seize dernières années. J’ai souligné les défis fréquents auxquels j’ai été confronté au sein du système de santé ghanéen pour avoir un accès équitable aux services de prise en charge des MNT. J’ai aussi évoqué les circonstances socio-économiques qui m’ont empêché, et qui m’empêchent encore, d’accéder à des services essentiels, depuis mon diagnostic jusqu’à la prise en charge de ma maladie. Le premier épisode a été très émouvant pour moi parce qu’il m’a rappelé les nombreux obstacles et engagements financiers auxquels je dois faire face tous les jours, tout en recevant le strict minimum de services de santé nécessaires pour contribuer de manière significative à ma vie, à ma famille et à ma société.

Dans cette épisode, je présente la communauté ghanéenne des personnes vivant avec des MNT, en mettant l’accent sur des histoires spécifiques de personnes qui se sont battues et continuent de se battre pour survivre contre les nombreuses inégalités en matière de santé.

Il est important de dire que mon parcours avec les MNT a commencé dans la solitude, car je pensais que j’étais seul avec ma maladie et dans mon combat pour recevoir des soins de santé optimaux, jusqu’à ce que je rencontre la communauté des personnes vivant avec des MNT par le biais de Sharecare Ghana et de l’Alliance ghanéenne sur les MNT Mon parcours avec Sharecare Ghana a commencé après avoir vu la directrice de l’époque, Nana Yaa Agyeman, raconter ce qu’elle avait vécu à la télévision. Malheureusement, elle est décédée en août 2022, et elle me manque. Au fil des ans, j’ai commencé à jouer un rôle plus actif au sein de Sharecare et j’ai été présenté à l’Alliance ghanéenne sur les MNT en 2018 C’est là que mon parcours de militant et formateur-pair a décollé.

Tout a commencé en 2018 avec le parrainage de l’Alliance mondiale sur les MNT, lorsque j’ai eu l’occasion de suivre une formation de plaidoyer. Cette expérience a changé ma vie, d’autant que j’étais encore en train de m’adapter à ma nouvelle situation après le diagnostic. Une nouvelle étape a démarré pour moi, où j’ai entendu une multitude de voix appelant à l’équité en santé afin de s’attaquer de manière adéquate aux MNT que chacune de ces personnes devaient gérer et avec lesquelles elles devaient vivre. Je me suis aperçu que je n’étais pas seul.

Je vis dans la capitale du Ghana, et donc, bien entendu, je m’attends à y trouver ce qu’il y a de mieux dans tous les domaines, santé comprise. Mais je me suis rendu compte que les personnes vivant avec des MNT dans les régions rurales du Ghana sont souvent confrontées à des situations plus désastreuses.

Et c’est vraiment le cas : M. Seth, qui vit avec l’hypertension et un cancer de la prostate, raconte qu’il doit parcourir chaque mois plusieurs kilomètres entre Akenkensu (une communauté rurale de l’est du Ghana) et Oda pour obtenir sa dose mensuelle de médicaments. Le traitement, dit-il, n’est pas disponible dans son centre médical local, qui se trouve à quelques minutes à pied de chez lui. Il déplore en outre les nombreuses annulations à l’hôpital où ses visites ont dû être reprogrammées en raison de l’indisponibilité d’un médecin/prescripteur. Ces personnes n’étaient pas disponibles à cause du ratio patient-professionnel de santé élevé qui oblige les prescripteurs à s’occuper à la fois des patients ambulatoires et des patients hospitalisés.

Vivre avec une MNT au Ghana est épuisant physiquement, émotionnellement et mentalement. M. Essel, qui est diabétique, a raconté comment il a dû rester assis pendant plusieurs heures dans le service ambulatoire, sans lit, pendant une transfusion, alors même qu’il était arrivé en urgence. Il plaisante souvent à propos de cette expérience qu’il appelle le syndrome du lit absent. Une capacité suffisante pour les admissions aux urgences devrait faire partie intégrante d’un système de santé équitable. Cependant, on ne peut pas dire que ce soit le cas ici au Ghana. Il est courant d’être transféré en raison du manque de lits ; la plupart des établissements de santé au Ghana sont confrontés à ce défi. Le cas de M. Essel n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Cette situation entraîne également des décès à l’arrivée. Je me souviens, en 2018, de l’histoire d’un homme vivant avec de multiples MNT qui a fait la une des journaux pendant quelques mois. Il est mort dans sa voiture à son arrivée à l’hôpital LEKMA, après avoir été rejeté par sept autres hôpitaux en raison d’un manque de lits.

Il est très difficile pour les personnes vivant avec des MNT de trouver un emploi pour faire face financièrement à ces frais médicaux. J’ai cherché un emploi bien rémunéré pour mieux gérer cette maladie, et cela n’a pas été facile du tout. Dans la plupart des cas, et en raison des difficultés liées à la vie avec une MNT, et à sa gestion, nous sommes contraints d’arrêter les études, ce qui nous rend moins qualifiés pour obtenir des emplois bien rémunérés.

Martha, une autre défenseure vivant avec un trouble mental, déplore la pénurie de services et de médicaments de psychiatrie dans tout le pays. Il n’existe que trois hôpitaux psychiatriques publics au Ghana, et ils sont situés dans deux des seize régions du Ghana. Cela signifie que les habitants de quatorze régions doivent voyager et traverser différentes villes et villages pour accéder à des services de santé mentale à Accra ou à Cape Coast, une situation qui entraîne un diagnostic tardif des problèmes de santé mentale et accentue la gravité des maladies évolutives. Grâce à des efforts de plaidoyer, nous avons assisté à l’introduction par les Services de santé du Ghana d’unités de psychiatrie dans certains établissements de santé au niveau des districts et des sous-districts. Indépendamment de ces mesures, de nombreuses personnes, qu’il s’agisse de personnes cherchant des soins de santé mentale ou de leurs aidants, font état d’un nombre limité de spécialistes et d’un équipement de diagnostic inadéquat.

Il est intéressant de constater que les problèmes de santé mentale sont les moins couverts par le régime national d’assurance maladie du Ghana : le traitement est entièrement à la charge des patients. Membre du Conseil d’administration de l’Autorité nationale d’assurance maladie depuis 2021, dont il a pris la tête en 2022 en tant que Directeur général, l’honorable Dr Oko Boye s’est engagé à inclure le traitement de la santé mentale dans le régime d’assurance maladie, dans le cadre des engagements mondiaux et nationaux du gouvernement en matière de couverture sanitaire universelle. Mais nous voici en 2024 et les personnes vivant avec des troubles mentaux au Ghana sont consternées, et se demandent quand exactement leurs médicaments et thérapies seront pris en charge comme pour les maladies physiologiques.

Et si vous le permettez, je voudrait aborder aussi la question de la stigmatisation sociale associée aux MNT, et l’impact de cette stigmatisation sur nos vies. La plupart des personnes vivant avec des MNT au Ghana cachent leur état et passent des années sans en parler à personne, pas même aux membres de leur famille, à cause de la stigmatisation associée à ces maladies. Qu’il s’agisse d’être appelé par le nom de votre maladie ou de devoir contredire vos proches qui vous donnent des conseils non médicaux sur la meilleure façon de gérer la maladie, les personnes vivant avec des MNT doivent mener une double bataille : gérer leur maladie et subir la stigmatisation et la discrimination de la communauté. La stigmatisation ne se limite pas aux amis et à la famille, dans certains cas elle s’étend aux établissements de santé où les professionnels estiment que si vous avez une MNT c’est parce que vous avez de mauvaises habitudes de vie, et ils retardent indûment, voire refusent certains services, en particulier lorsqu’il y a un manque d’équipements.

Au cours du projet de suivi communautaire 2022/2023 de l’Alliance ghanéenne sur les MNT, j’ai été témoin de nombreuses inégalités au sein de diverses communautés de la capitale ghanéenne. Des communautés surpeuplées d’environ un millier d’habitants qui ont accès aux services de santé dans un petit centre communautaire de planification et de services médicaux (également connu sous le nom de centre CHPS) avec une seule sage-femme et deux infirmières. L’indisponibilité généralisée des médicaments dans les établissements de santé semblait normale, et il était pénible de voir le mauvais état des routes à emprunter pour rejoindre les établissements de santé. La question qui me taraude est la suivante : « Si les services de santé dans les grandes villes sont aussi catastrophiques, dans quel état se trouve la prestation des services de santé dans les communautés rurales et difficiles d’accès du Ghana ? »

La pandémie de COVID-19 a mis en évidence les lacunes dans la prise en charge des MNT par le système de santé ghanéen, et révélé les vulnérabilités auxquelles sont confrontées les personnes atteintes de maladies chroniques sous-jacentes. Les exemples que j’ai mentionné dans cet épisode ne sont que quelques-uns de la liste interminable des inégalités vécues par de nombreuses personnes vivant avec des MNT au Ghana. Et oui, nous devons nous en inquiéter, parce que ces inégalités ont un impact sur la personne qui vit avec des MNT, mais aussi sur la famille et la communauté au sens large, et cela montre qu’il est difficile pour l’individu de contribuer de manière significative à sa communauté.

D’ici au prochain et dernier épisode de mon podcast, réfléchissez à tout cela et pensez aux façons dont les gouvernements peuvent se montrer à la hauteur de la situation et répondre aux différents besoins de santé de leur population.

À bientôt !

 

Cette transcription fait partie du carnet de Christopher Agbega, Hé ! Minute ! Je ne serais pas seul ?, série 5 des Carnets MNT.

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L’impact des prestataires de soins de santé sur mon parcours avec des MNT.

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